Mission Gillet sur l’articulation ONR/universités : le rapport attendu pour fin mai (S. Retailleau) (NT 5 mai 2023)

« Nous attendons fin mai les retours du rapport Gillet », déclare Sylvie Retailleau à propos de la mission qu’elle a confiée à Philippe Gillet, le 01/12/2022 sur « les évolutions de l’écosystème national de la recherche et de l’innovation » ; ce rapport final avait initialement été demandé par la ministre pour avril 2023.

Elle s’exprime lors d’une série de questions au gouvernement sur le thème de l’attractivité et de la compétitivité pour la recherche française, à l’Assemblée nationale le 03/05/2023, où elle précise ses attentes vis-à-vis de cette mission.

Selon elle, il est important, sans toucher aux statuts des chercheurs et E-C, d’« éclaircir, préciser, clarifier » le rôle des ONR et des universités :
• en donnant aux ONR « un rôle de pilotes nationaux, d’agences de programmes pour pouvoir avoir une vision programmatique de la recherche en France » ;
• et « aux universités un rôle beaucoup plus fort de pilotage de la recherche au niveau territorial avec la vision de pluridisciplinarité ».

Elle ajoute qu’un des objectifs est aussi « la simplification, nous y travaillons, en particulier dans la mission Gillet : il y a une demande de propositions fortes et concrètes, de mesures pour simplifier la gestion au niveau des laboratoires mixtes ; et nous sommes en train d’évaluer toutes les simplifications à apporter pour simplifier les tâches administratives à tous et en particulier aux chercheurs. »

Toujours sur ce sujet de l’articulation entre les acteurs de la recherche, la ministre évoque la « réuniversitarisation, donc le lien avec les CHU : nous allons lancer une mission avec le ministère de la santé pour essayer de regarder les liens des universités avec les CHU qu’il va falloir renforcer, redresser ».


Mission Gillet : « Un regard sur la gestion financière au niveau des UMR »

« La simplification est un enjeu majeur aujourd’hui pour gagner en compétitivité et surtout pour donner du temps aux chercheurs pour retrouver leur mission cœur qui est de faire de la recherche et pas de l’administration », ajoute Sylvie Retailleau.

Selon elle, la mission Gillet doit donc aussi « avoir un regard sur la gestion financière au niveau des unités mixtes de recherche dans le but de simplifier la gestion du financement de la recherche et de simplifier à tous les niveaux : État et aussi opérateurs de recherche ».

LPR : s’emparer de la revoyure pour discuter d’une accélération

Devant les députés, Sylvie Retailleau évoque d’autres sujets. Parmi eux, la LPR pour laquelle le MESR est en train de préparer un bilan « que je viendrai vous présenter », leur indique-t-elle.

Au député LR Patrick Hetzel, qui lui demande si elle compte se saisir de la clause de revoyure de la Loi de programmation de la recherche « afin de porter dès 2027 la recherche à 3 % du PIB et à au moins 30 % la part dédiée à la recherche biomédicale », Sylvie Retailleau répond par l’affirmative.

À partir de ce bilan, il s’agira selon la ministre de « discuter de la revoyure et d’une accélération de la LPR pour pouvoir effectivement atteindre les objectifs qui ont été fixés en France et au niveau européen et par rapport aux objectifs que nous avons fixés à la LPR au départ ».

La ministre évoque aussi deux dispositifs initiés avec la LPR : les chaires de professeur junior, le repyramidage et le nouveau régime indemnitaire Ripec, et notamment leur impact sur les femmes scientifiques.

Chaires de professeur junior : plus de 44 % d’étrangers ou de Français revenant de l’étranger

« Nous avons fait un bilan un peu détaillé sur ces chaires de professeur junior : aujourd’hui, elles montrent une vraie attractivité pour des chercheurs venant de l’étranger un peu matures, pas non plus complètement professeurs qui viennent finalement :

  • soit sur des profils très pluridisciplinaires ;
  • soit des chercheurs étrangers qui ne maîtrisent pas au départ la langue, qui font beaucoup de recherches, et qui vont ensuite s’intégrer dans nos établissements.

On avait aux alentours de 11 à 14 % de chercheurs revenus ou venus de l’étranger, aujourd’hui sur ces postes on en a plus que 44 % sur les deux premières campagnes ».

52 % de femmes promues professeures d’université via le repyramidage

Sur le sujet de la proportion de femmes dans les carrières scientifiques, « nous suivons avec grand intérêt les effets de la LPR et les premiers bilans que je vous présenterai sont positifs ».

Elle indique qu’« avec le repyramidage, nous avons atteint cette année 52 % de femmes promues en tant que professeures d’université », contre 41 % au global en 2021. Mais elle rappelle que « seulement 29 % de femmes sont professeures d’université ».

Donc « ce repyramidage – dans lequel on demande moins de mobilité géographique, où on va gérer plus de la carrière globale (…) – est probablement plus adapté pour reconnaître toutes les tâches d’enseignants-chercheurs et en particulier celles faites par les femmes ».

Elle indique que le MESR suit aussi de près le repyramidage pour les agents administratifs et techniques : « Et là aussi, nous avons de premiers effets très favorables pour les promotions de carrière ».

Ripec : « pas d’autocensure de la part des femmes »

Quant à la hausse des primes liée au Ripec et leurs nouveaux critères d’attribution, « on observe qu’il n’y a pas eu cette année d’autocensure de la part des femmes parmi les candidatures pour les primes individuelles ; elles ont été plus nombreuses à être candidates et aussi à être lauréates », selon la ministre qui annonce qu’elle donnera des chiffres précis sur ce point aux députés lors du bilan de la LPR. 

Elle évoque aussi le sujet de la parité dans les comités de sélection : « c’est quelque chose de clé et que nous suivons de façon très forte ».

Enfin, elle indique que le MESR travaille avec le ministère de l’éducation nationale « pour mettre en œuvre de nouvelles mesures pour l’attractivité des jeunes femmes vers les métiers scientifiques, du primaire jusqu’à l’université, en travaillant sur les formations des professeurs des écoles, sur les [rôles] modèles : nous allons prendre de nouvelles mesures ».

CEA : discussions en cours avec le MESR pour maintenir son attractivité

Interrogée par le député LR Raphaël Schellenberger sur le CEA qui « pourrait se retrouver dans des difficultés en matière d’attractivité, notamment de cerveaux, de nouveaux chercheurs, du fait de sa stratégie notamment salariale », la ministre indique qu’un effort a été fait à l’été 2023 pour accompagner le CEA et l’ensemble des Epic, « mais en particulier le CEA sur ce qu’on appelle la RNPP, c’est-à-dire la revoyure des salaires qui sont négociés chaque année au sein du CEA ».

« Il y a aussi dans la LPR quelques postes en plus qui accompagnent le CEA, en particulier fléchés sur le projet de microélectronique, à Grenoble. Et nous continuons à avoir des discussions en cours avec le CEA pour pouvoir garder une attractivité à tous les niveaux de la recherche dans ce bel organisme. »

Ne pas toucher au crédit impôt recherche

À propos du CIR, elle déclare qu’il est selon elle « important de garder cette stabilité, de ne pas changer les règles tous les quatre matins, de travailler sur la durée aussi bien du côté privé que du côté public, de retrouver une certaine stabilité des règles. Donc oui l’idée, même si on peut le faire évoluer à la marge, c’est de ne pas toucher au niveau du CIR pour ne pas perdre cette stabilité et de l’attractivité ».

« La réforme de 2008 du CIR a eu aussi des effets positifs sur les activités de R&D, le chiffre d’affaires et l’investissement des entreprises ont été là, mais c’est vrai que ces effets ne sont statistiquement significatifs que pour les PME.

Le CIR n’a pas suffi à contrecarrer cette perte d’attractivité du site France pour la localisation de la R&D des entreprises multinationales étrangères. L’augmentation de la R&D de ces entreprises en France est plus faible que celle que l’on voit dans le reste du monde. »

Un outil attractif pour les PME

Le CIR « est un outil qui est aujourd’hui attractif pour les PME et pour faire venir les entreprises sur le territoire et pour encourager la recherche entre le public et le privé (…). Sur 15 700 entreprises déclarantes, ce sont 12900 PME, 2200 ETI et 500 grandes entreprises. Donc 83 % des déclarants sont des PME pour 28 % de la créance ; cela peut sembler faible, mais les PME touchent en proportion plus de CIR que leur poids dans la R&D privée qui est de 19 %. »

« Toutes les entreprises que j’ai rencontrées nous demandent de maintenir le CIR », conclut-elle sur ce point.

Formations scientifiques : « nous sommes en train de cartographier les besoins » en lien avec le MENJ

« Les formations scientifiques en 2021 dans l’enseignement supérieur représentent 25,5 % des formations. Donc aujourd’hui, nous avons besoin en particulier de bacs +3 aussi ;entre 2011 et 2021, il y a eu des effectifs en hausse avec 5,8 % dans les IUT, 33 % dans les filières universitaires et 44 % des écoles ingénieurs », indique la ministre.

« Malgré cela, ça ne suffit pas. Donc nous sommes en train de cartographier, de regarder les besoins pour pouvoir créer des places, augmenter au niveau de ces filières scientifiques. On travaille avec le ministère de l’éducation nationale parce qu’il faut attirer, expliquer les métiers, regarder les débouchés. »

Elle précise que les filières scientifiques comptent 43 % de jeunes filles, « même si uniquement 29 % sont présentes dans les écoles d’ingénieurs ».

« Nous avons créé avec les autres ministères 10 000 parcours de réussite de jeunes filles vers le numérique que nous sommes en train de mettre en place et différentes mesures pour attirer les jeunes vers les sciences et les financer avec France 2030 en particulier. »

Elle évoque enfin « le groupe de travail au niveau du ministère qui est en train de regarder les formations dans le secteur privé et devrait me donner des conclusions avant l’été pour [avoir] -sans parler de contrôle sur ces secteurs- un certain retour auxquels les parents et les étudiants ont droit ».

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