Retraite : décryptage du courrier du premier ministre du 11 janvier
Vendredi 10 janvier, le gouvernement a transmis son projet de loi aux Caisses, aux partenaires sociaux et au Conseil d’Etat pour la première étape du processus législatif. Vendredi également, se tenaient une série de bilatérales entre Matignon et les partenaires sociaux pour discuter de la méthode pour la conférence de financement. A l’issue de ces réunions, le Premier ministre a annoncé l’envoi le lendemain d’un courrier aux partenaires sociaux proposant un compromis. Cette Info Rapide vise à décrypter ce courrier reçu le 11 janvier.
Celui-ci contient des éléments positifs pour la CFDT :
– Le maintien de la volonté d’une réforme ambitieuse, visant à construire un « système universel de retraite, par répartition et par points. » Celui-ci concernera l’ensemble des Français.
– La poursuite des concertations thématiques sur les sujets suivants : pénibilité, minimum de retraites, emploi des seniors, et gestion des fins de carrière dans le privé comme dans le public. Les résultats de ces concertations devraient intégrer, au moins pour ce qui en dépend, le projet de loi.
– Le Premier ministre confirme que la gouvernance du futur système sera largement confiée aux partenaires sociaux et bénéficiera des leviers nécessaires.
– L’annonce d’une conférence de financement, comme proposée par la CFDT, et pilotée par Jean-Jacques MARETTE, ancien directeur général de l’AGIRC-ARRCO. Elle devrait rendre ses conclusions pour fin avril.
– Le retrait de l’âge pivot prévu dès 2022, et à partir de la génération 1960.
Concernant le retrait de l’âge pivot, il s’agit d’une première victoire à mettre au compte de la CFDT. C’est grâce à notre organisation qu’un grand nombre de personnes nées à partir de 1960 n’auront pas à repousser leur départ à la retraite pour toucher une pension équivalente.
La notion d’âge d’équilibre est maintenue dans le futur système, à partir de 2037 (première génération à partir en retraite avec les nouvelles règles – génération 1975). Même si cet âge d’équilibre a moins d’impact sur les pensions dans un système à points que dans le système actuel, la CFDT l’a toujours combattu : le souhait du gouvernement est d’avoir un âge de référence collectif (identique pour tous), la CFDT veut que, comme aujourd’hui, l’âge de départ soit personnalisé (pour mieux prendre en compte la diversité des carrières). A ce sujet également, le Premier ministre recule significativement : il accepte dans son courrier le principe d’aller vers plus d’individualisation de cette référence collective. Ceci montre que la CFDT a marqué un point et qu’elle ne doit pas relâcher la pression.
Pour autant, le Premier ministre n’évacue pas la question de l’équilibre financier du système de retraites. Il renvoie la discussion à la conférence de financement.
Celle-ci a deux objectif :
– Proposer des mesures pour atteindre l’équilibre financier en 2027,
– Formuler des recommandations en ce qui concerne le pilotage du système à moyen et long terme (dépenses et recettes du système).
La CFDT se félicite que le débat ne se focalise pas que sur le niveau de dépenses (qui lui est maîtrisé), et qu’il porte également sur les ressources du système de retraites. Ainsi, pourront être notamment questionnées la baisse des ressources liées aux cotisations retraites de l’Etat employeur et la non compensation des exonérations de charges sociales (heures supplémentaires, CICE). Enfin, le gouvernement exclut deux éléments de la conférence de financement : une baisse des pensions, et une hausse du coût du travail avec le souci de la compétitivité des entreprises françaises.
Si la conférence de financement n’aboutissait pas, le Gouvernement prendrait ses responsabilités, mais sans que la solution soit dès aujourd’hui arrêtée. C’était pour la CFDT la condition sine qua non à sa participation à une telle conférence. Le Premier ministre affirme également que les travaux de la conférence de financement seront pris en compte. Le message implicite est que si l’on veut peser sur la conférence de financement, il faut que chaque acteur formule des propositions. C’est ce que la CFDT fera.
Cette conférence sera de fait une préfiguration de la gouvernance du futur système de retraites. La première victoire que constitue le retrait de l’âge pivot positionne notre organisation comme un acteur clé de ce débat important. La CFDT entend maintenir la pression sur le gouvernement. Les lignes ont bougé et il s’agit de continuer à les faire bouger notamment en matière de pénibilité, de minimum de pension et sur les fins de carrière.
A ce jour, les différentes concertations se poursuivent et la CFDT attend le projet de loi rectificatif pour en faire une analyse approfondie.