Secret médical et pratiques administratives (CFDT FP 16 juin 2021)
Publié le 16/06/2021 Par Pôle juridique – CFDT Fonction publique
Dans sa décision du 11 juin 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution, en l’état actuel du droit, la transposition dans la loi de l’article 7 de l’ordonnance « santé famille » du 25 novembre 2020.
Cet article visait à autoriser à des personnels non soumis au secret médical l’accès aux données de santé nécessaires au traitement administratif de certains dossiers, notamment de demande de congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS).
Que des personnels non soumis au secret médical aient accès à des données de santé est aujourd’hui, et depuis longtemps, un état de fait. Sans remettre en cause le principe du secret médical, la CFDT s’interroge sur une nécessaire évolution du droit, qui permettrait de concilier à la fois l’intérêt des agents et le principe de réalité de la gestion administrative.
La discrétion professionnelle s’impose à tous les agents publics
Seules quelques professions sont soumises au secret professionnel, mais tous les agents publics sont soumis à l’obligation de discrétion professionnelle. Elle leur interdit notamment de divulguer, y compris à d’autres collègues, les informations à caractère personnel ou confidentiel dont ils auraient connaissance dans le cadre de l’exercice de leurs missions.
Les agents des services de ressources humaines connaissent particulièrement bien cette obligation puisqu’ils la mettent en œuvre quotidiennement, étant amenés, de par leurs fonctions, à connaître et traiter des informations relatives à la situation familiale et personnelle des agents, à leur carrière et leur rémunération, mais aussi relatives à leur état de santé : situation de handicap ou de grossesse, lieux d’hospitalisation, fréquence et durée des congés pour raison de santé etc.
La mise en oeuvre du CITIS rebat les cartes du secret médical
On voit bien là que, dans la pratique, la différence entre ce qui relèverait de la seule discrétion professionnelle, et ce qui relèverait du secret médical est parfois bien ténue. Elle l’est d’autant plus lorsqu’il s’agit de traiter des accidents de travail ou des maladies professionnelles. Les agents des ressources humaines ont bien souvent connaissance, même fortuitement, d’informations qui seraient normalement réservées aux seuls médecins.
Avec l’instauration du CITIS, la question est devenue plus prégnante encore puisque le traitement administratif des demandes d’ouverture des droits nécessite d’avoir connaissance de faits médicaux précis, attestés par des documents tels que des certificats médicaux, des résultats d’examen, des ordonnances etc.)
Pour une réglementation de l’accès aux données de santé
Après la décision du conseil constitutionnel et en l’état actuel du droit, agir dans le strict respect du secret médical reviendrait à n’autoriser que les personnels qui y sont soumis, c’est-à-dire les personnels médicaux, à procéder à la gestion administrative des dossiers d’accidents de travail ou de maladie professionnelle.
Pour la CFDT, cette solution n’est ni réaliste ni souhaitable : irréaliste au regard du manque chronique de personnels de santé dans la fonction publique et dont il serait plus favorable aux agents qu’ils exercent leurs missions de santé au travail ; pas souhaitable parce que la gestion administrative ne s’improvise pas doit et rester l’affaire de professionnels, qui encore une fois traitent quotidiennement de données confidentielles et savent le faire.
Il ne s’agit pas pour autant de se contenter d’un statu quo, et de laisser cet aspect du travail de ressources humaines dans un vide juridique. Pour la CFDT, s’appuyer sur la réalité pour réglementer cette pratique plutôt que de la laisser dans l’ombre, aiderait justement à en prévenir les dérives
La situation des agents qui sont amenés à avoir connaissance d’informations médicales pour l’exercice de leurs missions doit enfin trouver un cadre légal, qui sécurise leur activité tout en garantissant à l’ensemble des agents les conditions du strict respect de la confidentialité de leurs données de santé