La recherche publique en France en 2019 : diagnostic du CoNRS
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Dans le contexte de la préparation d’une loi de programmation pluriannuelle de la recherche, ce document présente la contribution du Comité national à l’analyse de la situation de la recherche publique en France, de son évolution récente (depuis la loi LRU de 2008) et de ses perspectives. Ce diagnostic sera complété par un ensemble de propositions qui feront l’objet d’une approbation solennelle lors de la session plénière du Comité national organisée à Paris le 4 juillet prochain.
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La consultation des membres du CN fait apparaître un consensus large sur des éléments de constat importants. Sont soulignés en particulier :
- l’importance stratégique d’un soutien public à la recherche fondamentale, mue par la volonté de faire progresser les connaissances, non contrainte a priori par l’impératif de répondre à de « grands défis » de société. Ce soutien passe par un niveau suffisant de financement pérenne de la recherche, non conditionné par la promesse de l’obtention de résultats à court terme. De fait, l’histoire des sciences abonde d’exemples d’innovations majeures obtenues par sérendipité. En outre, les innovations majeures pour le bien-être des sociétés humaines ne sont pas toutes des innovations commercialisables ;
- le niveau insuffisant du financement public de la recherche publique et la dégradation tendancielle de cette situation. La dépendance qui en résulte vis-à-vis de sources de financement externes est préjudiciable à l’autonomie de la démarche scientifique ;
- les modalités insatisfaisantes d’allocation et de répartition des crédits publics de recherche ;
- les effectifs trop faibles d’emplois scientifiques (chercheur.e.s, enseignant.e.s-chercheur.e.s, ingénieur.e.s et technicien.ne.s) dans les universités et les organismes de recherche ; et la dégradation tendancielle de cette situation ;
- la généralisation de la compétition au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) à tous les niveaux (entre régions, sites ou établissements ; entre unités ou entre équipes ; entre individus) pour l’accès à des ressources notoirement insuffisantes ; les effets délétères de cette compétition généralisée sur les collectifs de recherche et les pratiques de coopération, qui sont pourtant au cœur de la pratique scientifique ;
- plus largement le caractère collectif de l’activité scientifique est trop peu reconnu et les collectifs de recherche (équipes, unités) sont insuffisamment soutenus ;
- la dégradation importante des conditions de travail au sein de l’ESR depuis au moins une décennie, sous l’effet des facteurs précédents et d’une croissance importante des tâches administratives ;
- les rémunérations trop faibles des personnels scientifiques, de manière criante en début de carrière et pour les personnels, nombreux, en situation de « blocage » plus ou moins durable de carrière.
Rien ne saurait justifier cet étiolement manifeste, désormais installé dans la durée, de notre capacité nationale de recherche. La richesse de la nation augmente plus rapidement que les ressources qu’elle alloue à sa recherche. La population nationale s’accroît, et plus rapidement encore la population étudiante et celle des diplômé.e.s de l’enseignement supérieur. La comparaison avec les autres « grandes nations scientifiques », parfois utilisée abusivement, est ici éloquente quant au sous-investissement public (comme privé d’ailleurs) dans la recherche en France. Ce qui rend la situation particulièrement regrettable, et même alarmante, au-delà de toutes considérations corporatives des scientifiques, c’est que les défis en matière d’accroissement des connaissances scientifiques sont considérables. Défis économiques certes en termes de croissance, de compétitivité et d’emploi selon la terminologie convenue — encore conviendrait-il de s’interroger sur : quelle croissance, quelle compétitivité et quels emplois ? —, mais aussi, et peut-être surtout, défis en matière de santé, d’environnement et de changements environnementaux, de cohésion des sociétés contemporaines.
Dans ce contexte, et en dépit de signes préoccupants comme la désaffection croissante des étudiant.e.s de l’enseignement supérieur pour les formations à et par la recherche, il est remarquable que les carrières scientifiques restent fortement attractives. Elles continuent d’attirer des jeunes professionnel.le.s de très haut niveau, français.e.s comme étranger.e.s et formé.e.s en France comme à l’étranger. Elles continuent de donner lieu à un engagement remarquable de la part des personnels de l’ESR, toutes catégories confondues. En outre, il est tout aussi remarquable que la qualité de la recherche produite en France reste de très haut niveau, quels que soient les indicateurs retenus. La possibilité d’obtenir un emploi stable peu d’années après la thèse (même si ce délai tend à s’allonger) et le statut de la fonction publique, gage d’indépendance, sont de l’avis général des facteurs décisifs de l’attractivité et de la qualité de la recherche française.
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