Vente de Meudon : déclaration intersyndicale au CSA du MESR du 10 février 2023
Comité social d’administration du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche
10 février 2023
Déclaration liminaire intersyndicale
FSU, Ferc-CGT, UNSA, Sgen-CFDT, Sud, FO ESR
Campus de Meudon-Bellevue du CNRS
Madame la ministre de l’enseignement supérieur et la recherche,
Vous avez envoyé le 25 janvier 2023 un courrier à la direction du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) lui ordonnant de vendre une partie du site de Meudon-Bellevue au prix de 38,7 millions d’euros proposé par les sociétés immobilières VINCI Immobilier Ile-de-France et KAUFMAN & BROAD DEVELOPPEMENT.
Suite à votre courrier du 25 janvier 2023, une séance extraordinaire du Conseil d’administration du CNRS a été convoquée ce vendredi matin 10 février 2023.
Lors de cette séance, le Conseil d’administration a autorisé le Président-directeur général du CNRS à vendre la parcelle au prix et dans les conditions imposées par les sociétés immobilières.
Nos organisations syndicales FSU, Ferc-CGT, UNSA, Sgen-CFDT, Sud et FO ESR dénoncent avec la plus grande fermeté cette décision et alertent sur les conséquences très dommageables qu’aura cette vente pour le CNRS et les personnels du campus de Meudon-Bellevue du CNRS.
Cette cession par le CNRS, que vous avez ordonnée, à un prix nettement inférieur à celui fixé par un cabinet indépendant d’expertise et de conseil en valorisation immobilière, sera évidemment dommageable à l’établissement. Cette vente est d’autant plus choquante que le préjudice financier subi par le CNRS et l’État se fait au bénéfice de sociétés privées.
Le projet de cession impose également au CNRS de libérer la parcelle au plus tard le 15 mars 2023, avant l’expiration du permis de construire au 14 avril 2023. Cette condition impose aux personnels travaillant sur la parcelle cédée de changer de lieu de travail dans la précipitation : c’est d’une violence inqualifiable à leur égard.
En six semaines, la division technique de l’Institut national des sciences de l’univers doit déménager avec, parmi le matériel à évacuer, des machines-outils de plusieurs tonnes. Un tel déménagement « éclair » nous semble impossible à réaliser dans des conditions qui protègent la santé morale et l’intégrité physique des agentes et agents concernés – sans parler des délais légaux administratifs à respecter. De plus, ces collègues, après une période de travail insoutenable pour réaliser ce déménagement, seront isolés de tout collectif de travail et même sans travail pour certaines et certains d’entre eux jusqu’à la réinstallation de leur service à Gif-sur-Yvette, prévue au plus tôt fin 2023. Sur le plan scientifique, des travaux à réaliser dans le cadre de programmes spatiaux ou d’observation au sol se verront, de fait, retardés et le cursus des apprentis ingénieurs de 3ème année fortement dégradé.
Les personnels du service central des concours du CNRS se retrouvent également sans locaux alors même que des concours étaient déjà programmés à partir de la fin du mois de février 2023. Tous les concours de recrutement du CNRS de l’année 2023 se trouvent bouleversés et devront être organisés sur d’autres sites en France. La Conférence des présidentes et des présidents des sections du Comité national s’est émue de cette situation et, dans une motion dont vous êtes destinataires, a formulé le vœu que « le Conseil d’administration du CNRS du 10 février prochain fasse obstacle à toute opération mettant en péril la tenue des concours ».
Le travail des personnels de CNRS-Images, la banque d’images scientifiques du CNRS, dont la mission est de créer et produire du matériel iconographique et audiovisuel pour permettre au grand public de comprendre les enjeux de la recherche et son impact sur la société, est aussi bouleversé. Les précieuses archives dont ils ont la charge sont également directement impactées par le déménagement précipité qui nécessite, pour les plus fragiles d’entre-elles, la location de réfrigérateurs pour assurer leur conservation. De même, la disparition d’une salle de montage placera les équipes de réalisation dans l’incapacité de conduire dans les temps leurs projets cinématographiques.
Enfin, les agentes et agents du site de Meudon-Bellevue du CNRS n’auront plus de restauration collective après le 15 mars 2023.
Nos organisations syndicales constatent et tiennent à alerter le ministère que cette décision du ministère a été prise sans aucune consultation du Comité social d’administration du CNRS, compétent quant aux restructurations, alors que cette vente va induire des réorganisations majeures, engendrer des déménagements, et sans aucune expertise de l’impact que ces bouleversements vont avoir sur les conditions de travail des collègues concernés.
Pour l’ensemble du personnel concerné, subissant une restructuration d’une brutalité et d’une violence inouïes, nos organisations syndicales vous demandent d’exiger et d’obtenir par tous les moyens que la date butoir de leur déménagement soit reportée à fin décembre 2023. Nos organisations demandent aussi la promulgation d’un arrêté de restructuration accompagné d’une enveloppe financière dédiée permettant de provisionner les indemnités et primes de restructuration auxquelles peuvent avoir droit les personnels concernés et leur famille.
Nos organisations syndicales vous demandent, Madame la Ministre, de rendre public votre courrier du 25 janvier 2023 à la direction du CNRS. En effet, à notre connaissance, ce courrier contiendrait des obligations supplémentaires, qui vont au-delà de la vente au rabais : le CNRS devrait prendre en charge les travaux d’assainissement, permettre le passage et l’entreposage de matériels pendant toute la période de construction sur le site du CNRS qui jouxte le chantier ; il devrait également prendre à sa charge les frais liés au déménagement en urgence des services logés sur le site. Enfin, votre courrier demanderait de proposer d’ici deux mois un projet d’aménagement du site sous forme d’un « projet de prestige » autour de la science et de son patrimoine, avec un délai d’engagement du chantier dans les six mois. Ces instructions concernant l’avenir du site de Meudon doivent être connues du personnel du CNRS, car ces projets de grandes ampleurs ne peuvent pas être mis en œuvre sans avoir consulté le personnel concerné et leurs instances représentatives.
Nos organisations syndicales dénoncent avec la plus grande fermeté votre décision, Madame la Ministre, d’ordonner au CNRS cette cession d’une partie du site de Meudon-Bellevue aux conditions demandées par les sociétés immobilières.
Nos organisations syndicales s’opposeront avec tous leurs moyens à cette vente et ses conditions qui sont incontestablement dommageables tant aux personnels concernés, qu’aux intérêts du CNRS, de la recherche publique et même de l’État.
Nous vous remercions, Madame la Ministre, de l’attention que vous accorderez à ces éléments et, notamment, de l’attention que vous porterez aux conditions de travail des personnels concernés et aux intérêts du CNRS.