FONCTION PUBLIQUE : UNE POLITIQUE DE RÉMUNÉRATION À REVOIR D’URGENCE !

Il est grand temps de renouer un pacte républicain pour refaire des services publics un vecteur de qualité de vie et l’expression de nos valeurs de solidarité, soulignent Mylène Jacquot et Johan Theuret.

La mobilisation contre le projet de réforme des retraites continue car #64ansCestNon !

Nul ne sait mesurer les conséquences de ce conflit. Ce qui est certain, c’est que la longue indifférence de l’exécutif à ce mouvement de contestation laissera des traces profondes dans notre démocratie, tant sociale que politique.

Le pouvoir a tout de même reconnu la nécessité d’investir dans les services publics… ce qui ne fera pas l’économie du pouvoir d’achat des agents.

Rester attractif sur le marché de l’emploi exige de rouvrir des discussions, voire des négociations, sur des mesures générales immédiates : hausse de la valeur du point ou ajout de points. Le gouvernement doit ouvrir rapidement la porte des discussions. Il y a urgence.

C’est le sens de la tribune que Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT Fonction publique,  co-signe avec Johan Theuret, co-fondateur du Think Tank « Sens du service public ».

Le lien vers la tribune : https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-fonction-publique-une-politique-de-remuneration-a-revoir-durgence-1932882

Le texte de la tribune 

Les sondages et rapports qui soulignent les marques tangibles de ce que Jérôme Fourquet nomme le « délitement des services publics » se succèdent. Nul ne sait mesurer l’ampleur des conséquences des semaines de conflits sur la réforme des retraites. Ce qui est certain, c’est que l’indifférence de l’exécutif à ce mouvement de contestation laissera des traces profondes dans notre démocratie, tant sociale que politique.

Ce délitement au long cours et cette contestation inédite appellent impérativement des mesures en faveur des services publics. Il convient de renouer un pacte républicain pour refaire d’eux l’expression de nos valeurs de solidarité et un vecteur de qualité de vie.

S’ils offrent des métiers qui ont du sens, l’incapacité à donner des perspectives salariales soulève de nombreuses interrogations. Dès lors, un plan d’investissement en faveur des services publics doit marquer un coup d’arrêt à la dégradation inexorable de la rémunération des agents, symbolisée par le gel de la valeur du point entre 2010 et 2022.

Les plus de cinq millions d’agents publics ne peuvent plus être laissés dans un système de rémunération à bout de souffle, après des années de gel quasi permanent du point et de mesures sectorielles toujours insuffisantes, même si elles sont positives (PPCR, Ségur de la Santé, Beauvau de la sécurité, Grenelle de l’Education).

La question de la rémunération renvoie à la problématique du pouvoir d’achat dans un contexte d’inflation, et à la considération que les pouvoirs publics accordent aux agents publics. Ainsi, la hausse de 3,5 % de la valeur du point en 2022 a été rapidement absorbée par une inflation qui dépasse les 6 %, et les grilles de rémunération n’ont toujours pas fait l’objet du chantier structurel lancé en 2021.

Le tassement des grilles indiciaires et celui des rémunérations qui en découle entraînent une érosion du pouvoir d’achat, des difficultés managériales et un sentiment de non-reconnaissance. La dernière augmentation du SMIC au 1er janvier, en bénéficiant à 400.000 agents publics, rappelle que 8 % des fonctionnaires sont payés au salaire minimum.

Elle signifie également qu’un agent de catégorie B (technicien, auxiliaire de puériculture, …) en début de carrière perçoit une rémunération indiciaire supérieure de 14,5 euros au SMIC, et qu’un agent de catégorie A (enseignant, cadre administratif, bibliothécaire…) en début de carrière a une rémunération supérieure de 179 euros au SMIC.

On le sait, la rémunération n’est pas le seul facteur d’attractivité, mais elle est souvent primordiale dans les choix qu’ont à faire les jeunes. C’est pourquoi les attentes salariales sont légitimes en raison du maintien du pouvoir d’achat, de la promotion de l’attractivité et de la qualité des services publics.

Rester attractif sur le marché de l’emploi exige de rouvrir des discussions, voire des négociations, sur des mesures générales immédiates : hausse de la valeur du point ou ajout de points. Le gouvernement doit ouvrir rapidement la porte des discussions. Il y a urgence.

Le chantier annoncé par le ministre Stanislas Guérini ne doit pas geler, le temps qu’il se termine, les évolutions salariales pressantes. Il doit construire un dispositif pérenne. Il ne s’agirait pas d’indexer la valeur du point sur l’inflation, ce qui favoriserait les plus hautes rémunérations, mais de construire un indicateur partagé pour donner de la visibilité aux agents publics sur leur pouvoir d’achat.

Intégrer les montées en compétences au long de la carrière et valoriser les qualifications et prises de responsabilités devra aussi être un axe fort. Comme un travail sur les politiques RH pour notamment encadrer le recours aux parts variables individuelles en les objectivant et en valorisant plus la dimension collective du travail.

L’enjeu des politiques de rémunération est aussi celui de la qualité du service public, voire de sa continuité.

Mylène Jacquot, Secrétaire générale CFDT fonction publique

Johan Theuret, Cofondateur du Sens du service public

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